« Ce n’est, dit-on, ni pour se nourrir plus délicatement, ni pour se vêtir plus superbement, que la plupart souhaitent d’être riches ; et cependant le démon leur suggère mille moyens de faire des dépenses : il emploie mille artifices pour leur persuader que les choses inutiles et superflues sont absolument nécessaires, et que leur fortune n’est jamais suffisante. Ils destinent leurs biens aux besoins présents et à venir : ils en réservent une partie pour eux et une partie pour leurs enfants. Ensuite ils les partagent en mille dépenses diverses. Écoutez quelles sont leurs destinations différentes. Il faut, disent-ils, qu’une partie de nos richesses soit pour notre usage, et que l’autre soit mise en réserve. On ne se tient point dans les bornes de la pure nécessité. Cette partie est pour la magnificence du dedans, cette autre est pour le faste du dehors. L’une est pour l’appareil des voyages, l’autre pour l’éclat et la splendeur de la maison. Rien de plus surprenant que de voir toutes les inventions du luxe. […] Lorsqu’ils ont consumé leurs revenus par tant de dépenses inutiles, ils enfouissent le reste et le mettent en lieu sûr. L’avenir est incertain, disent-ils, il faut se précautionner contre les nécessités imprévues. […] De-là il arrive que vous enterrez votre cœur avec votre argent. ‘Où est votre trésor, dit Jésus-Christ, là est votre cœur’ (Mt 6, 21). Voilà pourquoi les commandements de Dieu paraissent si durs aux riches. La vie leur semblerait odieuse s’ils n’étaient pas occupés de dépenses superflues » (St Basile de Césarée)
« Depuis les plus grandes jusqu’aux plus petites [créatures], sa Providence se répand partout ; elle nourrit les petits oiseaux qui l’invoquent dès le matin par la mélodie de leur chant ; et ces fleurs, dont la beauté est si tôt flétrie, elle les habille si superbement durant ce petit moment de leur vie, que Salomon dans toute sa gloire n’a rien de comparable à cet ornement. Vous, hommes, qu’il a faits à son image, qu’il a éclairés de sa connaissance, qu’il a appelés à son royaume, pouvez-vous croire qu’il vous oublie et que vous soyez les seules de ses créatures sur lesquelles les yeux toujours vigilants de sa providence paternelle ne soient pas ouverts ?” (Bossuet, Sermon sur la Providence)
Il faut surtout se souvenir en ces choses, qu’il y a des âmes de tempéraments divers. Il y a des âmes si peu portées à l’action, qu’elles succombent aussitôt qu’elles se trouvent en face d’une tâche qui s’impose à elles ; et d’autres sont si agitées qu’elles ne peuvent supporter un seul moment d’être inoccupées.
Il faut donc que les âmes qui aiment la tranquillité ne s’efforcent point d’arriver à une activité débordante, ni que les âmes agitées ne se contraignent pas d’une façon excessive pour arriver à la contemplation.
Souvent il est arrivé que ceux qui pouvaient dans la paix arriver à la contemplation ont succombé sous des occupations excessives, et ceux qui pouvaient se rendre utiles par le travail ont été tués par le repos.
Et il est arrivé que, dans leurs spéculations, des esprits inquiets voulant posséder plus qu’ils ne pouvaient contenir, ont abouti à des conceptions perverses ; et au lieu d’être des disciples de la vérité, se sont fait des maîtres de l’erreur…
Les deux vies, l’active et la contemplative, bien unies dans une âme, sont comme les deux yeux dans le visage : elles se prêtent un mutuel concours. »
Pour pénétrer dans ce monde de la misère, il y a des étapes, il faut savoir s’arrêter devant le misérable, le regarder, I’écouter et finalement le toucher. II y a toute une gamme de nuances dans les attitudes à l’égard de la personne blessée,
Celui qui passe, comme le lévite el le prêtre, devant l’homme roué de coups, affalé par terre: il ne voit pas la détresse. Il ne ‘arrête pas.
Celui qui s’arrête devant le misérable, qui donne peut-être quelque chose, mais sans regarder le visage, sans rencontrer les yeux de l’autre.
Celui qui s’arrête et regarde le visage de l’autre mais il parle tout le temps, il dit ce qu’il faut faire … II n’écoute pas, il ne le touche pas.
Celui qui s’arrête, qui regarde le pauvre et qui n’a pas peur de lui parler et de l’écouter dans ses besoins profonds.
Celui qui s’arrête, qui regarde, qui écoute et qui n’a pas peur de s’engager et de toucher l’autre, de le prendre dans ses bras: il le porte dans l’espérance de le voir guérir et ressusciter.
Entre l’arrêt et le regard on peut encore reculer. Entre le regard et I’écoute, on peut encore fuir. Mais l’arrêt conduit normalement au regard, le regard à l’écoute et l’écoute au toucher…
La communion se réalise dans le toucher; et toute la compassion consiste à porter l’autre en soi, à le porter dans son cœur et dans ses bras.
Jean VANIER, Ouvre mes bras, Paris, Fleurus, 1973, p.73-74
“Écoute, mon fils, l’enseignement du maître, ouvre l’oreille de ton cœur. Accepte volontiers les conseils d’un père qui t’aime et fais vraiment tout ce qu’il te dit. En travaillant ainsi à obéir tu reviendras vers Dieu. ” (Prologue de la Règle v.1, 1-2).
Comme pour le Serviteur chez Isaïe, lui-même image prophétique du Christ : « La Parole me réveille chaque matin, chaque matin elle me réveille comme celui qui se laisse instruire. Le Seigneur m’a ouvert l’oreille… ». (Is 50,4-5 ; Ps 40(39),7 ; Heb 10,5 ss).
Le cœur, au sens biblique, c’est à dire notre être profond, est le lieu de l’engagement et de tout combat. C’est sur lui qu’il faut veiller car c’est de lui que jaillissent les sources de la vie. L’écoute est un cœur à cœur qui aboutit à la conversion par la voie de la conversation.
Quand nous l’écoutons, l’Ecriture devient Parole de vie qui nous est adressée personnellement par Dieu :« Laissons la voix puissante de Dieu frapper nos oreilles et écoutons ce qu’elle nous dit. Tous les jours elle nous crie : « Si vous entendez sa voix, n’endurcissez pas votre cœur ! » PS 95 (94,8)…
Nous écoutons la Parole de Dieu dans la liturgie et dans la lectio divina seul ou en groupe. Nous écoutons Dieu aussi dans les événements à la lumière de sa Parole. Nous écoutons Dieu dans les inspirations intérieures de l’Esprit Saint. Par exemple : « La prière doit être courte et pure sauf si Dieu dans sa bonté nous fait sentir que nous devons prier plus longtemps » (Règle 20,4)…
« Dieu nous parle dans l’aujourd’hui de notre vie mais nombre de nos contemporains manquent de temps et de méthode pour se mettre véritablement à son écoute. Et pourtant la soif d’une parole qui nous est personnellement adressée est grande dans notre monde où trop souvent l’individu est renvoyé à sa solitude. » (Mgr Gérard Daucourt)…
L’ouverture du cœur, selon toute la tradition monastique, est importante pour le chemin de conversion. Le cœur de l’homme est le lieu le plus riche et le plus sombre, le lieu où tout ce qu’il vit se répercute et oriente son agir. Il faut faire venir à la lumière tout un monde connu et inconnu, décrypter ces passions bonnes ou mauvaises…
Laissons remonter le désir le plus profond qui nous habite. « Qui veut la vie ? Qui désire le bonheur ? Tel est l’appel que le Seigneur lance à la foule pour y trouver son ouvrier? Si tu entends cet appel et si tu réponds : Moi, Dieu te dit : « Est-ce que tu veux la vraie vie, la vie qui dure toujours ? » (Prologue v.14-17).
En Isaïe, Dieu a cette formule lapidaire : « Écoutez et vous vivrez. » (Is 55). Et Jésus énoncera cette béatitude : « Heureux ceux qui écoutent la parole de Dieu et qui l’observent » (Luc 11,28).
Je n’ai pas la prétention de vouloir vous offrir une flore complète de Martillac, ce qui demanderait beaucoup de soins, de travail, d’études, de recherches; je veux seulement réunir dans ces pages les plantes les plus connues, celles que j’ai vu croître et fleurir en ces lieux ; quelques – unes peut-être n’existent plus, elle ont été remplacées par d’autres qui auront elles-mêmes un pareil sort; aussi je citerai les plus ordinaires, celles que tout le monde peut voir, admirer et peut-être même mépriser, mais qui n’en sont pas moins toutes utiles et nécessaires dans les desseins de Celui qui se plut à créer les cèdres du Liban aussi bien que les mousses de no guérets….
Quand on considère leur variété, la diversité de leurs formes, l’éclat de leurs couleurs, les parfums qu’eIles exhalent, la délicatesse, le fini de leurs traits, de leurs nuances, cette perfection qui se trouve en chacune d’elle, il est impossible de ne pas s’écrier: Seigneur, que vous êtes bon et admirable dans vos œuvres!
Vous avez voulu par cet ensemble merveilleux de fleurs si différentes, si multiples, si belles chacune dans son genre, forcer notre admiration à vous rendre nos hommages.
Chaque fleur ne m’est-elle pas une invitation à vous louer, à vous bénir? Chaque fleur ne m’enseigne-t-elle pas une leçon, une prière?… C’est ce qui m’a fait composer cette louange qui doit toujours être sur nos lèvres comme dans notre coeur:
Seigneur, soyez loué et béni dans vos oeuvres!
Mère Emmanuel Bonnat (1803-1882 Sainte-Famille de Bordeaux
“Le Charisme
est une force permanente dans l’Eglise
qui ne la quittera jamais
jusqu’à la fin des temps.
Signe et fruit de l’Esprit,
il manifeste l’action de Dieu
sur son Eglise.”
(Père Matta El-Maskîne)
Pourquoi St Pierre et St Paul
sont-ils fêtés le même jour ?
Revenons d’abord à l’histoire. Simon, que le Christ appellera Pierre, était un pêcheur – autant qu’un pécheur, serait-on tenté de préciser – galiléen, qui vivait à Capharnaüm, au bord du Lac de Tibériade. Un provincial, identifié comme tel grâce à son accent par plusieurs personnes au soir de l’arrestation de Jésus. Saul, avant d’être connu sous le nom de Paul, était, lui, un juif pharisien, lettré, citoyen romain de la ville de Tarse, en Asie mineure.
Leur point commun ? Le complet bouleversement produit par le Christ dans leur vie, qu’illustre dans les deux cas leur changement de nom. « Et il leur dit : “Venez à ma suite, et je vous ferai pêcheurs d’hommes.” Eux, aussitôt laissant les filets, le suivirent », précise l’évangile selon saint Matthieu au sujet des premiers apôtres, dont Pierre, qui laissent tout pour suivre Jésus. Quant à Paul, il est aveuglé sur la route de Damas et tombe à terre en entendant « une voix qui lui disait : “Saul, Saul, pourquoi me persécutes-tu ?” », rapporte le livre des Actes des Apôtres. Pierre est la pierre sur laquelle le Christ bâtit son Église ; Paul, le prédicateur qui voyagera sur tout le bassin méditerranéen pour apporter l’Évangile aux païens. Tous deux mourront en martyrs, Pierre crucifié la tête en bas, et Paul, décapité. Selon la tradition, le premier est inhumé au Vatican, près de la voie Triomphale, en 64 et le second enseveli sur la voie d’Ostie, en 67.
Pierre a donc été au fondement de l’Église, tandis que Paul a consacré sa vie à la diffusion de l’Évangile. Deux destins pour une finalité commune, comme le souligne saint Augustin dans un sermon prononcé lors de la célébration de cette fête : « En un seul jour, nous fêtons la passion des deux apôtres, mais ces deux ne font qu’un. Pierre a précédé, Paul a suivi. Aimons donc leur foi, leur existence, leurs travaux, leurs souffrances ! Aimons les objets de leur confession et de leur prédication ! »
C’est donc bien en raison de l’importance et de la complémentarité de leur mission que ces deux piliers de l’Église sont célébrés ensemble.
Quand vous entendez le Seigneur demander : « Pierre m’aimes-tu ? », considérez Pierre comme un miroir et regardez-vous en lui. Est-ce que Pierre représentait autre chose que la figure de l’Eglise ? Lorsque le Seigneur interrogeait Pierre, c’est nous l’Eglise qu’il interrogeait. »
“Sans l’espérance, vous ne rencontrerez jamais l’inespéré qui est introuvable et inaccessible” (Héraclite d’Ephèse)
Il y a un paradoxe dans cette affirmation, un paradoxe révélé dans l’annonce faite à Marie par l’ange Gabriel…
L’ange Gabriel est porteur de l’inespéré. Au-delà de ce que Marie aurait pu imaginer, et plus encore: au-delà de ce que Marie aurait pu désirer…
Mais son désir s’évapore dans la présence de l’Annonciateur. Il annonce autre chose et quelque chose se passe. Marie est ouverte. Elle a “la petite espérance”, cette petite clef maîtresse, cette petite soeur qui porte la foi et et l’amour, selon Péguy. Cette clef qui ouvre sur l’inespéré. “Qu’il me soit fait selon ta parole dit Marie en dépit du bon sens. Mais elle a reconnu la parole de Dieu. L’inespéré: celui qui nous exauce au-delà de nos voeux”
Marion Muller-Collard “Eclats d’Evangile” p 155 et 156 Ed Bayard – Labor et Fides