Lu ailleurs
Souvent nous entendons dire « j’ai la foi », ou bien « je n’ai pas la foi », comme on dirait « j’ai une valise » ou « je n’ai pas de parapluie ». D’ailleurs, comme ce dernier, que l’on oublie fréquemment, certains diront aussi : « J’ai perdu la foi »…
Ce clin d’œil ne veut ni masquer, ni minimiser la souffrance de ceux et celles qui traversent une période de doute ou qui, depuis de longues années, sont en vain à la recherche de Dieu.
Certes la foi n’est ni un objet, ni une tradition que l’on peut posséder, perdre ou retrouver. Elle est une invitation, un sens pour notre vie. La foi signifie une adhésion, un engagement qui, chaque jour, est à renouveler. Elle prend corps dans le temps, comme un horizon à bâtir, personnellement et avec d’autres.
Mais la foi ne se mérite pas, elle est un don mystérieux de Dieu. Ce don de Dieu se découvre dans l’histoire de tout un peuple de croyants. Il s’enracine dans la réponse que font des hommes et des femmes face à la rencontre de Jésus-Christ. Cette réponse, un peu folle aux yeux de certains, engage leur vie et le sens de leurs actions même s’ils ne savent pas toujours jusqu’où cet engagement doit les mener.
La foi chrétienne s’enracine dans l’Evangile, qui n’est pas une parole figée dans l’histoire. L’Evangile continue à s’écrire à travers la vie de tous ceux qui acceptent de suivre le Christ.
Ni savoir, ni recette-miracle, la foi au Christ est au risque d’un chemin de confiance, chemin de confiance qui, pour certains, restera tout au long de leur vie humaine, chemin d’ombres et de brouillard.
Le Pape François a expliqué à Mgr Domenico Sorrentino, évêque d’Assise, ses intentions dans une lettre : « Je veux parler de la manière dont l’Eglise doit se dépouiller, comment d’une certaine façon l’Eglise doit répéter le geste de François et les valeurs que ce geste implique », a-t-il écrit, faisant référence à l’épisode de la vie du Poverello qui se dépouilla de ses biens et de ses vêtements pour se placer sous l’autorité de l’évêque.
« Comme je voudrais une Église pauvre pour les pauvres ». Le Pape François a ainsi exprimé sa vision de l’Église, justifiant le nom, inédit dans l’histoire des successeurs de Pierre, qu’il s’est choisi. Cette référence à saint François d’Assise trouve sa pleine expression aujourd’hui puisque le Pape se rend dans la cité du « Poverello ».
” Il y a une salle à l’archevêché d’Assise inconnue du plus grand nombre. C’est là que l’histoire de François a connu un tournant radical. Dans cette pièce dite du « dépouillement », le saint s’est dépouillé de ses vêtements devant l’évêque, en renonçant aux biens de son père Pietro di Bernardone, abasourdi, et aux vanités de ce monde, pour épouser totalement la pauvreté évangélique…
Dans cet épisode extraordinaire, qui retient peu l’attention des itinéraires de pèlerinages, François exprime la radicalité de son choix : il se donne totalement à Dieu et se rend libre pour la charité envers ses frères et un nouveau rapport avec le monde. Il jette les graines du Cantique des créatures et de l’harmonie universelle qui concerne le corps aussi bien que l’esprit…
Aujourd’hui, ce sera la première visite de cette salle par un souverain pontife. Dans cette pièce, François devient « signe » pour le monde ; c’est là un message extraordinairement actuel dans le contexte historique dans lequel nous nous trouvons, de chercher à retrouver l’unité avec la nature et la paix. La visite du Pape nous aidera à relire cette icône historique dans sa véritable signification.” (Mgr. Sorrentino)
“Bienheureux les pauvres de coeur,
car le Royaume de Dieu est à eux.”
Cette pauvreté, chacun de nous peut l’acquérir. Que l’on soit le plus puissant chef d’Etat ou clochard sous le pont Neuf, chacun de nous peut être pauvre selon les béatitudes.Refuser d’user du pouvoir pour dominer, écraser ou pour s’enrichir, c’est être pauvre de coeur.
Partager avec tous ses compagnons de misère, refuser le luxe ou l’accessoire, c’est être pauvre de coeur.
Bâtir sa maison, son confort légitime avec sa femme pour ses mômes, mais après, mettre toutes ses forces pour que le voisin d’à côté ait sa maison lui aussi, son confort, c’est être pauvre de coeur, et pas demain, aujourd’hui.
C’est l’éternité qui entre alors dans la maison du pauvre de coeur. C’est l’amour éternel qui est déjà entré dans le temps… Dieu est à l’instant où l’amour est vécu. Et pour l’éternité qui est en route. Je peux mourir demain. Aujourd’hui je me défonce pour aimer, le Royaume de l’Amour est déjà commencé.
G.Gilbert
rencontres – Ed Droguet-Ardent p:156
Toute ma vie, j’ai cherché Dieu. Ce fut mon combat. Ce fut ma joie. Toute ma vie j’ai mis des hommes et des femmes sur le chemin de Dieu. Ce fut mon ministère. Ce fut notre commune aventure spirituelle. Parfois j’ai manqué d‘audace. Je n’ai pas cru assez en l’homme pour parler de Dieu.
J’ai fait l’expérience de Dieu, comme beaucoup d’entre vous. Il m’est plus présent à moi-même qu’au jour de ma première messe de jeune prêtre. Nous avons si longtemps voyagé ensemble. Disciple sur la route d’Emmaüs.
Et toujours cette expérience creuse en moi une espérance : cette connaissance en Esprit et en Vérité avive une soif…
Chercher Dieu et le trouver… le trouver et le chercher encore, tel est le thème constant de la Bible. Telle est l’authentique attitude du « savant de Dieu ». Car le trouver, c’est puiser en lui le désir et la force de le chercher encore.
Dieu n’est jamais celui que l’on possède, mais toujours celui que l’on attend. Nous savons « qu’il est » parce que nous expérimentons « qu’il vient ».
Cardinal François Marty
Trois jardiniers s’occupaient d’un grand jardin. Le premier travaillait tout le temps, longuement, il ne quittait sa partie du jardin qu’après avoir arraché toutes les mauvaises herbes, et que toute la récolte était engrangée.
Le deuxième ne travaillait pas autant, mais quand le jardin demandait toute son attention parce que le blé était mûr ou à cause d’une sécheresse imminente, il travaillait encore plus que le premier jardinier.
Le troisième jardinier finalement décida qu’il avait besoin d’un moment d’autoréflexion et de répit afin de réfléchir sur sa vocation et la direction à donner sa vie. Alors de temps à autre, il s’absentait du jardin.
Lequel des trois jardiniers fait preuve d’un vrai sens des responsabilités?
Notre réponse serait probablement : « Le premier jardinier montre très clairement un grand sens des responsabilités, c’est lui qui travaille le plus ». On bien nous dirions : « C’est évident, c’est le deuxième jardinier dont nous avons besoin pour entretenir notre jardin. Il sait travailler dur quand il le faut ».
Mais qui d’entre nous choisirait vraiment le troisième jardinier, qui donne plutôt l’impression de négliger son jardin, de délaisser ses responsabilités ?
Alors le Maître Zen qui nous a proposé cette allégorie, dirige notre réflexion dans une autre direction :
« Ma réponse c’est que chacun à sa manière fait preuve de responsabilités. Nous avons besoin des trois jardiniers – et pas seulement dans le but d’avoir un jardin bien entretenu.
La responsabilité ne concerne pas seulement les tâches qu’il faut faire à l’instant présent. Quelque fois nous n’écoutons pas notre voix intérieure qui nous conseille de prendre du recul et de jardiner différemment. Celui qui perçoit cette voix doit quelques fois renoncer à ce qu’il fait depuis des années. De cette manière, il peut devenir un meilleur jardinier. Il est nécessaire, de temps à autre, de changer de perspectives pour être capable d’entendre cette voix intérieure. Elle nous mène à une nouvelle vision, sur de nouveaux chemins, voire vers un nouveau jardin.
Notre maître continue : « La responsabilité ce n’est pas seulement devoir rendre compte à nos supérieurs et à la famille. Il existe également une responsabilité face à ce qui nous dépasse : Dieu, un être supérieur et la Terre. Ne soyons donc pas trop sévères avec le troisième jardinier qui, grâce à ses interruptions, apprend peut-être mieux à travailler, voire même à travailler plus dur, ou qui décidera peut-être de s’occuper d’un autre jardin dans lequel poussent des fruits plus savoureux. Ne méprisons pas non plus le deuxième jardinier sous prétexte qu’il ne travaille pas sans cesse. Il a appris à travailler en harmonie avec les cycles naturels. Tout comme la nature, il économise son énergie pendant que la graine repose en terre inactive. En revanche, il se prépare à travailler deux fois plus vite au moment de la réclte, avant l’arrivée du gel. Nos ancêtres savaient très bien comment travailler tout ne respectant les cycles de l’énergie solaire, ils sont devenus des jardiniers remarquables car ils comprenaient et respectaient les rythmes de la nature.
Cela ne signifie pas toutefois que le premier jardinier serait moins important ou superficiel. Son engament, son don de soi est très précieux pour le jardin, et, en cas d’urgence nous aurions toujours à notre disposition un jardinier de confiance. Même en dehors du temps de la moisson, il prépare le prochain cycle et répare la clôture. Le deuxième jardinier symbolise l’équilibre naturel, le troisième jardinier la sagesse, le premier en revanche, la constance. Il est fiable, il garantit que le sol et la végétation seront toujours bien entretenus. Nous avons besoin des trois jardiniers dans la vie, et tous les trois montrent un vrai sens des responsabilités.
Cité dans “Le moine et l’entrepreneur” – Joachin Zeitz et Anselme Grün – Ed parole et Silence p 193-195)